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que je t'apprenne à jouer de la flûte, moi je veux bien. (Il va vers Césaire.) Mets tes doigts sur les trous, et souffle- Souffle donc.

Césaire. — Imbécile ! avec ces doigts que j'ai là !

Lazare. — C'est vrai qu'ils n'ont pas l'air habiles.. Essaie quand même.

Césaire, réfléchit. — Un jour, un violoniste est venu jouer dans un petit café où j'allais souvent. On disait qu'il était habile. Mais je ne l'écoutais pas ; je regardais sa figure. Il avait une drôle de mine. Tout d'abord j'ai cru, parce qu'il serrait le violon contre sa gorge, qu'il en avait le sang à la tète. Mais tout à coup, il n'y avait pas à s'y tromper, les larmes lui sont montées aux yeux ... Ah ! j'aurais bien voulu savoir ce qu'il sentait à ce moment-là !... Tu ne comprends pas ?... Ça ne fait rien ... Tu ne dois pas pensera grand'chose quand tu joues sur ta petite flûte?... A du cidre et à des galettes ?...

(Il semble encore examiner Viiistniment, puis délicate- ment il le brise.)

Lazare. — Ha ! la brute !

Césaire. — Tu ne pensais pas que j'allais t'observer comme l'homme au violon.

Lazare. — Tu m'en paieras une autre.

Césaire. — Quand je m'en irai.

Lazare. — Tu t'imagines qu'elle ne coûtait rien !

CÉSAIRE. — Laisse-moi tranquille.

Lazare. — Tu vas me la payer !

Césaire, lui jetant une pièce. — Là, ne crie pas !

(La%are regarde la pièce en homme qui a fait une- bonne affaire mais qui ne voudrait pas h laisser voir.)

(Césaire prend un ton autoritaire et bourru, comme s'il revenait au véritable objet de ses préoccupations.)

Tu es donc seul ici ?

Lazare. — C'était le tour du camarade d'aller lever les lignes. Il va rentrer.

Césair£, désignant h coin de la pièce. — C'est là qu'il

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