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INGRES VU Px\R UN PEINTRE

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��beaux remords, éprouve le besoin de retourner, lucide, cette fois, aux sources d'où son émotion est jaillie. Il tient en main, tel un prêtre nouveau, les signes mystérieux d'une religion inconnue, Va-t-il jongler avec ces symboles hermé- tiques, pour triompher sans contrôle ? Non, il va succomber à cette tendre défaillance provoquée dans son cœur par la sollicitation des choses charnelles : avec un tact admirable, ce sensuel, puisant dans la matière animée, en nourrira derechef ces lignes géométriques sur le point de se dessé- cher. La Naissance des Muses donne une idée de ce qu'eût pu devenir son œuvre, abandonnée à cet état de simple transposition. Les formes y sont admirablement spiritua- lisées, mais il leur manque une certaine ardeur, dont elles se fussent enrichies à être replongées dans l'élément vivant d'où elles sont issues. C'est cette trempe vivifiante qui leur manque, qu'Ingres donne presque toujours à ses œuvres. Il ne restreint pas l'élan de ses lignes ; il n'en jugule pas l'essor, mais il ajoute à leur articulation une chaude onc- tuosité, il augmente les formes d'un gonflement de sève, il les recouvre comme d'une enveloppe melliflue. Il trouve enfin le point d'équilibre admirable où la ligne métapho- rique et la ligne spécifique concluent un pacte indéfec- tible, où le sentiment naïf et la pure discrimination con- fondent leurs résultats. Merveilleux accord, entente sublime entre des éléments ennemis. La lutte intérieure dont Ingres vient d'être l'acteur et le témoin s'apaise, mais inonde la toile de ses ondes musicales.

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��On ne saurait citer trop d'exemples pour éclairer un sujet aussi complexe que celui du dualisme d'Ingres. Il est nécessaire de parler un peu technique, ti à.Q ^rocéàtï à des comparaisons.

Dans un tableau byzantin, où tout est construction géo- métrique, les cercles, les triangles, les parallélogranmies se

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