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MONSIEUR SLUDGE, LE MEDIUM 429

le tiennent éloigné de la niche du chien, du soleil et du vent, des bonnes farces et de la saine boue ; on lui enjoint de se montrer gentil, gracieux et digne, mais lui, du coin de l'œil, regarde les enfants déguenillés du ruisseau, occupés à leurs jeux ; il voudrait être là-bas, avec eux, au milieu de l'ordure, faire des pâtés de crotte et rire à son aise et parler franc, et traiter bonne maman de vieille toupie (ce qu'elle est en effet). Je vous en ai voulu, je vous le dis, à vous, à eux, de ces embrassades, de ces sottises. Je grinçais des dents par désir de voir passer un honnête chien... C'est mal, je vous le dis, de détruire une âme ainsi !

Mais qu'est-ce qui demeure « ainsi » ? Qu'est-ce qui est fixé ? Où peut-on s'arrêter ? Nulle part. Couvez le men- songe, il en sort la fraude, lentement et sûrement filée, juste à votre taille. Monsieur. Moi, je m'arrêterais bien, mais vous, vous êtes pour le progrès : « Rien que du vieux ? jamais de neuf ? Rien que le parler d'usage, par la bouche, ou récriture par la main ? Je croyais, je l'avoue, que lui se dévelop- perait, deviendrait démontrable, rendrait le doute absurde, don- nerait des formes que nous pourrions voir, des fleurs que nous pourrions toucher. Personne ne doute de vous, Sludge ! Vous rêvez les- rêves, vous voye:^ les visions de l'esprit, les discours vous naissent dans la cervelle, sans conteste. Néanmoins, à cause des sceptiques, pour clore le bec à tous, nous voulons une manifestation extérieure. Les Pensylvaniens y sont bien arrivés, pourquoi pas Sludge ? Il peut faire des progrès avec le temps ».

Ah ! oui, il peut en faire ! Il voit son sort : on n'évite pas le destin. — C'est d'abord une vétille : « Eh ! David, entends-tu ? C'est toi qui as poussé la table ? Ton pied qui l'a fait craquer ? Cette fois, tu veux ...plaisanter, n'est-ce pas, mon gar- çon ? — « AT. . . non » — Et me voilà perdu, vendu, acheté, désormais. Le bon vieux train-train facile, le... quoi ?... le ... non ! pas si faux que cela en tant que fausseté !... le filage et le fin tracé... vous savez bien... en vérité, rien qu'une façon de faire du roman, de jouer la comédie, d'im- proviser, de feindre, mais à coup sûr pas l'absolue tromperie l

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