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L ŒUVRE DE ROBERT BROWNING 415

Pourtant l'accueil qu'on fît à ce livre fut tiède. Sans doute les circonstances n'étaient pas favorables. Tennyson zvecMaud et In Memoriain, s'était emparé de la faveur du public. A côté de lui, pas de place sur le Parnasse. Au surplus la question de Crimée accaparait les esprits. Sébastopol venait d'être pris et l'on ne prêtait plus attention qu'à des poèmes où, comme dans Maud, l'on pût trouver quelque écho des événements du jour. Brow- ning était en Italie ; les Anglais se désintéressaient de lui. C'est pour la génération suivante qu'écrivait Browning — et pour tioiis.

Entre Men and Women (1855) et Dramalis Personx (1864) .se place le seul grand événement de la vie de Browning, la mort de sa femme (juin iSéi). La mauvaise santé de celle-ci, les soins donnés également à l'éducation de son fils, les événe- ments politiques avaient cependant ralenti considérablement sa production poétique, qui ne se ranima qu'en 1859.

C'est vraisemblablement vers cette époque que Sludgc fut composé.

11 n'est pas inutile, pour l'intelligence du poème, de rappeler comment il a pris naissance. - — Browning et sa femme rencon- trèrent à Florence, en 1857, le médium américain David Douglas Hume. M"'^ Browning, nerveuse, impressionnable, enthou- siaste, se passionna pour le spiritisme; Browning, qui aimait profondément sa femme et la connaissait, vit sans doute pour elle le danger des idées et des émotions où elle se laissait entraîner. Convaincu que le caractère de Hume ne méritait aucune confiance et que ses expériences ne pouvaient mener «1 rien, très conscient, d'autre part, de ses responsabilités d'homme et d'époux, il intervint, non sans violence, et fit cesser, brus- quement, toute relation avec Hume. A l'égard des médiums et de leurs adeptes, il garda une méfiance et une aversion compré- hensibles, mais il était d'un esprit trop ouvert, et il vouait à sa femme une trop tendre admiration, pour n'avoir pas compris l'attrait intellectuel et sentimental qu'elle pouvait éprouver. Aussi le poème de 5/«^/ff^ n'est-il pas, coni'ne on semble l'avoir cru, lors de son apparition, une simple att;ique contre le spiri- tisme. On y trouve à vrai dire une assez féroce caricature d'un personnage de médium et une satire des milieux spirites, mais tout entremêlées d'aperçus profonds sur les sentiments humains

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