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388 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

femme à briser la vie d'un homme ? où avez-vous pris que je fusse une femme sans cœur ? quand m'avez-vous vu faire souffrir qui que ce soit ? ne m'avez-vous pas vu faire l'aumône ? mon Dieu, demandez seulement à mes domes- tiques comme ils sont traités chez moi. Est-ce que j'ai fermé les yeux quand je me suis aperçue que Maria Vaillant me volait ? est-ce que je n'ai pas marié Yvonne avec le cocher de madame Protaize ? Est-ce que je fais une rente à ma mère ou non ? n'ai-je pas établi mon frère Edouard ? N'ai-je pas donné deux cents francs aux sinistrés du pa- quebot « l'Elan ». Alors? qu'avez-vous à me reprocher du côté cœur. Croyez -vous après cela que je sois femme à briser la vie d'un homme ? Ah ! non ! ce n'est plus le temps des culbutes et des jeux d'ombrelle ! nous sommes devant la vie comme deux malheureux qui se sont pris par amour. Et maintenant ! jugez-moi ! Non, Charles, ma maison ne vous est pas fermée, ne le croyez point. Vous me ferez toujours plaisir en venant me voir. Croyez que ce qui reste d'amour dans mon cœur me fera oublier la cruauté de votre dernière lettre et celle de votre attitude. « Celle qui est toujours votre amie,

« Anna Bourdin. »

Commentaire de la lettre

Il faut reconnaître que l'intérieur d'Anna Bourdin était coquet mais jusqu'à quel point doit-on admettre avec la maîtresse de Charles que celui-ci soit pour quelque chose dans le chambardement auquel il est fait allusion plus haut ? Non, Anna Bourdin, soyez franche ! n'est-ce pas vous qui avez été frappée de ce que madame Protaize vous avait dit : « Le laqué blanc ne se fait plus ! » De même pour le piano ! pourquoi rendre Charles responsable de ce dégoût du piano ? Charles aime la musique, mais avouez que la vôtre n'était pas supportable. Il n'est guère agréable d'en- tendre ânonner une chanson de Mayol avec un ou deux

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