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NOTES 371

l'é-vocateur ému, cela interloquera un peu ses premiers lec- teurs.

Ce n'est pas qu'un écrivain n'ait le droit de renouveler tota- lement ses manières de penser, de sentir et de s'exprimer. Mais il accepte le risque de déplaire à ceux auxquels il avait plu d'abord. Et si, comme c'est le cas pour Henri Bachelin, il se réduit en se renouvelant, au lieu de se compliquer et de s'enrichir, s'il cesse d'un coup de s'intéresser aux problèmes humains qui le tourmentaient jusqu'alors, pour se rallier sage- ment à Tordre établi, le risque est plus grave encore.

Le troisième Bachelin n'est d'ailleurs pas antipathique en soi, il n'a ni les lèvres pincées du premier, ni la pudeur à laisser transparaître son émotion et les révoltes un peu primaires du second. Il s'abandonne, il se livre. Il parle de son enfance et de l'enfance, comme nous nous lasserons sans doute un jour, mais comme nous ne sommes pas encore las d'en entendre parler. (( Quand j'essaie de jeter un regard en arrière sur les premières années de mon enfance, elles m'apparaissent comme un pays merveilleux qu'en pleine nuit j'ai traversé, bien avant le lever du soleil sur les champs et les maisons. De ci de là pourtant, un souvenir brille comme la lanterne qu'un homme d'équipe balance sur le quai... »

Il y a une école et des écoliers, une petite fille blonde, et enfin un petit garçon persécuté qui est le héros du récit et dont un camarade raconte l'histoire, à laquelle il est lui-même intimement mêlé, selon le procédé du Grand Meaulnes, de Fcrmina Marque^ ou de Vliiquièle Adolescence. Mais la trouvaille d'Henri Bachelin, c'est de n'avoir pas fait raconter la vie du plus fort par le plus faible, mais du plus faible par le plus fort, d'avoir glissé au premier plan un personnage de deuxième.

Signé d'un nom inconnu, ce petit livre aurait attiré sans tarder l'estime des lettrés.

Signé d'Henri Bachelin, il peut sembler un peu mince à ses admirateurs, et à ceux qui l'admirent, moins une concession un peu inattendue à un certain poncif néo-classique. Mais il ne s'agit peut-être que d'un délassement : dans ce cas, il faut le reconnaître charmant, d'une musique et d'une transparence de cristal. benjamin crémifijx

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