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NOTES 97

n'en viendra à bout. Il ajoute qu'il a lu Baudelaire autant que quiconque et n'entreprendra rien contre Baudelaire, Stendhal, Flaubert et autres anciens.

Mais revenant sur la question dans les pages finales du livre qui en sont les plus dramatiques et les plus émouvantes, il corrige la solution provisoire à laquelle il s'était arrêté : « Au lieu de regarder comme suffisamment amorcée du fait du groupement des producteurs en syndicats la culture morale et intellectuelle du prolétariat, regardons l'organisation du prolétariat comme le point de départ possible d'une civilisation nouvelle, la Civilisation' RÉVOLUTIONNAIRE. Ne disons pas qu'elle doit naître implici- tement de la lutte ; l'événement a donné tort à une vue si naïve. Ne disons pas que la culture bourgeoise ne saurait que souillerles germes de la future civilisation du monde des produc- teurs... Il subsiste dans la tradition démocratique un grand nombre d'idées que le prolétariat a intérêt à ne pas ignorer ».

Le livre qui s'ouvrait par un doute se clôt donc par un autre. Le système médian est renoncé par son auteur, du moins sous sa forme absolue. Mais ce qui est immuable, et forme la moelle du livre, c'est l'aspiration constante à l'héroïsme, une concep- tion héroïque de la vie et de la mission de l'artiste, proche parente de la conception lyrique d'un Elle Faure ou d'un Drieu La Rochelle. Avec cette différence que Faure ou Drieu La Rochelle voient dans la lutte, — donc le dualisme, — le moteur principal de l'art, et que Bloch le voit dans l'unité morale.

Doctrine à part, c'est une bien curieuse et héroïque aventure intellectuelle que celle de ce jeune homme qui, en 1910, de Poi- tiers où il vivait, se mit en tête de se mêler à la foire sur la place, pour y crier son dégoût, ses haines et son credo. Nul ne le con- naissait alors. Quatre ans plus tard, il avait rallié autour de lui un groupe cohésif, solide, armé pour la parade et l'attaque et sa revue l'Effort libre était la seule revue révolutionnaire qui ne fût pas la proie des démagogues et des illettrés. La guerre l'a tuée. Elle n'a pas été remplacée.

BENJAMIN CRÉMIEL'X

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