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868 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

objets absurdes que l'on appelle articles de Paris — eh bien voilà ce que vos aligneurs de vers produisent. Les mauvais vers de Nekrassov aussi sont de l'invention du commence- ment à la fin.

— Et Béranger ? demanda Suler.

— Béranger, cela c'est tout à fait ditïcreut. Qu'y a-t-il de commun entre les Français et nous ? Ce sont des sensuels, la vie de l'esprit n'est pas aussi importante pour eux que celle de la chair. Pour un Français, la femme est tout. Ce sont des gens opuiscs> émasculés. Les médecins disent que tous les gens, qui se meurent de consomption, sont des sensuels. »

Suler se mit à défendre son point de vue avec l'âpreté qui lui est particulière, lançant à tout hasard un flot de paroles. Léon Nicolaïevitch le regarda et dit avec un large sourire ; « Vous êtes irritable aujourd'hui, comme une fille qui a atteint l'âge nubile et qui n'a pas d'amoureux. »

XII

La maladie le desséchait encore plus, consumait quelque chose en lui. Intérieurement, il semblait devenir plus léger, plus transparent, plus résigné. Ses yeux sont encore plus aigus, son regard plus perçant. Il écoute attentivement comme s'il recherchait dans sa mémoire quelque chose qu'il y aurait oublié, ou comme s'il s'attendait à ce que quelque chose de neuf ou d'inconnu lui fût révélé. A Yasnaya Poliana, il me paraissait être un homme qui savait tout, et qui n'avait plus rien à apprendre — un homme qui avait trouvé une réponse à toute question.

XIII

S'il était poisson, il ne nagerait certainement que dans l'Océan, ne hantant jamais les mers étroites et surtout pas les

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