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SI LE GRAIN NE MEURT... 813

La première rencontre avec l'eucalyptus et la décou- verte, dans les haies qui bordaient les chemins vers Costebelle, d'un petit arum à capuchon, furent les évé- nements de ce séjour.

Pendant que nous nous morfondions à Hyères, maman, qui ne prenait pas son parti de notre déconvenue, pous- sait une exploration par delà TEsterel, revenait éblouie, et nous emmenait à Cannes le jour suivant. Si médio- crement installés que nous fussions, près de la gare, dans le quartier le moins agréable de la ville, j'ai gardé de Cannes un souvenir enchanté. Aucun hôtel et pres- que aucune villa ne s'élevait encore dans la direction de Grasse ; la route du Cannet circulait à travers les bois d'oliviers ; où finissait la ville, la campagne aussitôt commençait ; à l'ombre des oliviers, narcisses, ané- mones, tulipes croissaient en abondance ; à profusion dès que l'on s'éloignait.

Mais c'est principalement une autre flore qui recevait le tribut de mon admiration ; je veux parler de la sous- marine, que je pouvais contempler une ou deux fois par semaine, quand Marie m'emmenait promener aux îles de Lerins. Il n'était pas besoin de s'écarter beaucoup du débarcadère, à Sainte-Marguerite où nous allions de préférence, pour trouver, à l'abri du ressac, des criques profondes que l'érosion du roc divisait en multiples bassins. Là, coquillages, algues, madrépores déployaient leurs splendeurs avec une magnificence orientale. Le premier coup d'œil était un ravissement ; mais le passant n'avait rien vu, qui s'en tenait à ce premier regard : pour peu que je demeurasse immobile, penché comme Nar- cisse au-dessus de la surface des eaux, j'admirais lente-

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