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LES PIXCENGRAIN 567

Les genoux des trois femmes se touchaient. Elles avaient reconnu le curé du Monteil, Monsieur Bidon le maire, la Gerboise, sa fille Lucie. Il n'y avait que cet homme, gros et malpropre, assis sur le banc de la Ger- boise, devant sa porte, au pied d'une vigne pourrie, le soir, — qu'elles ne pouvaient pas reconnaître.

Comme leurs trois fronts se rapprochaient, Godichon entra. Il fit une pirouette et se saisit des mains de Véro- nique. Prisca et lui ignoraient la mort de « père ». Ses familiarités avec les membres précieux, soignés et tristes de Véronique, d'Eliane et de Madame Pincengrain parurent davantage ce soir une profanation. Godichon s'apeirçutde leur recul et rabattit ses expansions sur Prisca qui en fut heureuse.

Mesdames Pincengrain pèsent tous les mots qu'elles emploient. Elles disaient de leurs morts qu'ils étaient « partis » et de Monsieur Pincengrain qu'il était « mort ». Godichon remarqua ce soir-là qu'elles dirent du père pour la première fois : « Il est parti. »

��IX

��Le jour anniversaire des noces de Prisca, Madame Go- dichon vient annoncer aux Pincengrain le mariage de son fils cadet. Il épousera Marie. Mesdames Pincengrain se taisent devant ce nom. Le silence de Véronique et d'Eliane n'étonne pas Madame Godichon^ mais son fils aîné aurait-il appris l'indulgence envers son frère, le respect envers elle, une réserve sans exemple dans son passé, la politesse ?

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