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460 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

(Peut-être faut-il noter que se connaître et s'oublier ne s'opposent pas tellement. Le premier peut même mener droit au second : examen de conscience, humilité, sain- teté... On entrevoit les distinctions nécessaires, d'ailleurs.)

Considérations bien générales, ajoute M. Paul Claudel, mais point inutiles à faire comprendre l'œuvre d'un drama- turge. « Tandis que dans la vie on croit que ce sont les caractères qui expliquent l'action, ici c'est l'action qui impli- que les caractères. »

On le croit dans la vie. Mais si l'on attend du dramaturge des œuvres qui le montrent, c'est surtout parce que Racine et tous les classiques ont pensé qu'en effet les caractères doivent déterminer l'action. Pourtant il y a un point à bien voir : la tragédie, — qu'on a définie une crise, le moment de libre-arbitre oià tout étant mis en balance, chaque prota- goniste se rassemble, quasi hors de la durée, — n'est pas le drame, « action complexe ou collective ». Et l'on n'est point en droit d'opposer Racine à M. Paul Claudel.

Il serait curieux de relire, éclairés par ccWq Introduction , les huit ou dix drames que l'on sait. En premier lieu Tète d'Or, le plus héroïque, auquel j'imagine que va la faveur secrète de l'auteur. Y voit-on les caractères expliquer l'action, ou bien, au rebours ?... Cela fait question. Tête d'Or soulève un peuple et lui impose les sentiments que les circonstances exigent ; mais il avait en lui avant toute action la volonté d'être un surhomme :

Que tenterai-je ? sur quoi me jettenii-je d'abord ? L'audace aux yeux perçants crie en avant, et une trompette de fer excite mon cceur désespéré. . .

Puissc-je dex'enir terrible ! puissè-je épouvanter comme te vent et le feu!

La jeune fille Violaine illustrerait mieux la théorie. Ce sont bien les événements qui contraignent Violaine à la sainteté. Elle devient sainte parce qu'elle écoute l'appel de Dieu, la

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