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la nouvelle revue française

Agrippa. — Permettez-moi, Octave...

Octave. — Parlez, Agrippa.

Agrippa. — Votre mère vous donna une sœur, la très gracieuse Octavie. Marc Antoine à présent n'est-il pas veuf ?

Octave. — Que dites-vous là, cher Agrippa : si Cléopâtre vous entendait, son indignation bien motivée vous...

Antoine. — Mais Octave, je ne suis pas marié. Voyons ce que dit Agrippa.

Agrippa. — Pour vous maintenir en perpétuelle amitié, faire de vous des frères et couturer indéchirablement vos cœurs, qu'Antoine prenne Octavie pour épouse, dont la beauté ne mérite pas un moindre époux que le meilleur des hommes, dont la pudeur et dont la grâce racontent ce qu'aucun langage ne peut exprimer. Par ce mariage toutes ces petites jalousies qui nous semblent grandes, toutes ces grandes peurs qui nous brandissent leurs dangers, se trouveraient réduites à rien. La vérité paraîtrait conte, tandis qu'aujourd'hui des ombres de conte passent pour vérités. L'amour d'Octavie pour chacun de vous deux dicterait votre amour l'un pour l'autre et l'amour de tous pour vous deux. Pardonnez-moi de parler ainsi ; ce n'est pas une pensée fortuite que j'exprime, mais longuement et dûment méditée.

Antoine. — Qu'Octave se prononce.

Octave. — Après qu'Antoine aura fait connaître son sentiment.

Antoine. — Quelle serait l'autorité d'Agrippa pour mener à exécution son idée, au cas où je dirais : « Agrippa, qu'il en soit ainsi » ?