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2>4 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

par où j'ai passé ! Et puis, maintenant, il faut que je remonte. Dans dix semaines, vers Noël, j'aurai écono- misé assez pour m'acheter une robe décente, et alors je mettrai une annonce dans le Daily Telegraph, et je pourrai me présenter pour solliciter une place dans quel- que bureau. Je pourrais gagner ainsi huit et peut-être même dix livres par mois. Je me suis fait une espèce de clavier de machine avec du carton, et le soir, en rentrant, je m'exerce, pour ne pas perdre ma vitesse. Petit à petit, je pourrai mettre de côté de quoi m'acheter une machine d'occasion. Peut-être dans deux ans j'aurai de quoi l'acheter ; et alors je pourrais travailler aussi à domicile. Le loyer de ma chambre est si peu de chose ; il est vrai que c'est si loin ! mais quand je gagnerai davantage, je me rapprocherai du centre, et ainsi j'éco- nomiserai sur le prix des omnibus. Je pense que dans trois ans j'aurai commencé à vivre plus confortablement. Je pourrai même avoir un joli petit chien ou quelques oiseaux, et alors je serai la parfaite vieille fille, n'est-ce pas ? Vous voyez que j'ai bien trop de choses auxquelles il faut que je pense, — tous ces grands projets ambi- tieux, — pour avoir le temps d'être triste, et de cher- cher à me faire consoler par quelqu'un ! A présent, je hais tous les hommes.

— Faites une exception pour moi, M"'= Crosland. Mais que vous me haïssiez ou non, il faut que je vous dise ceci. Vous savez quelle amitié j'avais pour votre mère. (Marc et Queenie baissèrent les yeux.) Eh bien, je ^eux faire pour vous ce qu'elle-même aurait fait si vous l'aviez encore. Je vous en prie, ne me remerciez pas, M""' Crosland ; considérez, si vous voulez, que ce n'est

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