Page:NRF 15.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
186
la nouvelle revue française

Ménas. — Enobarbus, à ta santé !

Pompée. — Remplis encore, on voit les bords.

Enobarbus (contemplant ceux qui emportent Lépidus). — Voilà de bien solides gaillards, pour transporter un tiers du monde !

Ménas. — Oui dà ! le tiers du monde est ivre. Que ne l'est-il tout entier. Tout irait comme sur des roulettes.

Enobarbus. — Bois donc, et poussons à la roue.

Ménas. — Tournons.

Pompée. — Dis si nous approchons de tes fêtes d'Alexandrie.

Antoine. — Presque. Choquons nos coupes. Hurrah ! A la santé de César !

Octave-César. — Je me passerais bien de celle-là. C'est une tâche ardue que de se laver le cerveau pour le rendre plus trouble.

Antoine. — Prêtez-vous au jeu.

Octave. — Ne crains rien. Je te ferai raison. Mais plus volontiers je jeûnerais durant trois jours, que de tant boire en un seul.

Enobarbus (à Antoine). — Eh bien ! mon vaillant empereur ! Ne danserons-nous pas une bacchanale égyptienne pour couronner dignement notre orgie.

Pompée. — Allons-y, bon soldat.

(Tous se lèvent.)

Antoine. — Tenons-nous par la main, et tournons jusqu'à ce que le vin triomphe de nos sens, pareil au suave et délicat Léthé.

Enobarbus. — Les mains dans les mains. Que la musique nous assourdisse : je vais placer chacun. Cet