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I I .j LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

stiraii" non seulement intéressante à écrire, mais facile. D'abord le roman constitue depuis le Moyen-Age un genre pi-rfaitement continu, une série dense et compacte. Ensuite il nous présente un fidèle miroir de son époque, ou plutôt de l'idéal que se formait cette époque. Enfin, ne comportant jusqu'à Rousseau aucune œuvre de génie (si on laisse Rabe- lais de côté), accumulant, au contraire, des bibliothèques de médiocrité et des continents de platitude, il permet au criti- que historien d'établir entre le livre et son époque cette soli- darité, cette endosmose que ne viennent pas rompre le jail- lissement libre, l'équation personnelle de l'individu. Il existe sur ce sujet des essais partiels, le livre de M. Le Breton sur le roman au xvii*^ siècle, les curieux inventaires de la littérature courante au xviii^ siècle qu'a faits M. Momet. Nul équivalent pourtant, chez nous, de l'ouvrage d'ensemble de M. Saintsburv.

C'est qu'une histoire suivie du roman français implique un point de vue beaucoup plus naturel à un éti-anger qu'à nous. Un étranger voit commencer la littérature française, comme les autres littératures européennes, au Moyen-Age, et sa démarche la plus naturelle est de la suivre dès cette époque. Un Français laisse d'ordinaire aux médiévistes ce qui est antérieur à Villon ou même à Ronsard, La rupture, le hiatus entre la France du Moven-.\se et la France de la. Renaissance, figure, dans l'ordre littéraire, un trait français original pareil à ce qu'est en politique l'opposition scolaire entre la France de l'Ancien Régime et celle de la Révolution. La prétérition dédaigneuse du Moyen-Age chez Sainte-Beuve, le (' trou noir >> de Taine, les lances rompues par le pugnace Brunetièrc contre les médiévistes, sont assez significatifs. Or si l'histoire de la poésie et du théâtre s'accommode de cette coupure (et encore au prix d'une déformation certaine), l'histoire du roman ne s'en accommode pas. Le roman, bien que l'antiquité ait pu lui servir de a niatière », ne tient à peu

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