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RÉFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE II 3

alors qu'il s'appelait en France Loti, que l'impérialisme mâle de l'un s'oppose au féminisme nerveux de l'autre à peu près comme le Tommy des Chansons de la Chambrée à Mon frère Yves. De Tun et de l'autre côté du détroit les deux mondes littéraires nous offrent là deux points de repère intéressants. Et je laisse au lecteur le soin d'embrancher ces réflexions sur les réflexions concordantes que me suggéraient récemment le roman de la destinée et le roman de l'aventure.

M. Seillière s'est efforcé à retrouver dans les romans fran- çais antérieurs àja Nouvelle Hêloïse « les sources de la morale romanesque » et les figures du féminisme au moment où il se dédouble en un mysticisme passionnel. Il en a vu la naissance dans le lyrisme et le roman courtois, en particulier dans les poèmes de Chrestien deTroyes et les remaniements en prose du Lancclot. Il les a suivis dans l'oeuvre de Marguerite de Navarre, VAstrée et Madeleine de Scudéry. Il s'est souvenu que Rousseau fut dans son enfance un grand lecteur de romans, que lui et son père, après souper, en dévoraient ensemble toute la nuit, et que VAstrée en particulier était son roman préféré. De sorte que Rousseau^nous arrive porté par tout Un flot de littérature romanesque dont il est utile de reconstituer l'inventaire, et dont la place est particulièrement importante dans les filiations, les généalogies intellectuelles où se plaît la critique de M. Seillière.

Et je me demandais, en suivant ces filiations qui en somme sont assez justes, pourquoi nous ne possédons pas une histoire du roman français, ou plutôt pourquoi nous l'avons laissé écrire par un critique anglais, d'ailleurs fort distingué, M. Saintsbur}-. Précisément M. Saintsbury vient de publier le deuxième volume de son History of ihe french novel. Je ne l'ai pas encore lu, mais j'ai lu le premier qui va jusqu'en' 1800, et les souvenirs de cette lecture me paraissent apporter quelque réponse à cette question.

Au premier abord, une histoire du roman français

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