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BEAUTÉ, MON BEAU SOUCI 99

lui avait refusé, du reste. Mais il reviendrait à la charge. Ah ! quelle belle fille c'était ! Et ce visage obscur et rayonnant, qui était celui de la Bonté quand elle souriait, celui de la Justice si elle fronçait un peu les sourcils et celui de l'Espérance lors- qu'elle rêvait ! Il était seulement dommage que ses-^ parents eussent donné à cette robuste déesse brun€ le nom douceâtre, blond et virgilien, deLavinie. Elle aurait dû s'appeler Lucrèce... ou Clodia.

• Pounant il se devait à lui-même de conquérir l'autre, la femme du monde. Il le devait pour la satisfaction de son amour-propre et pour la bonne opinion qu'il dési- rait que ses amis eussent de lui. C'était une liaison qui le poserait. Mais qui sait si elle ne l'asservirait pas ? Et puis, 'enfin, il aimait les femmes plutôt en peintre et en sculpteur qu'en moraliste et en romancier, et Lavinie était belle, tandis que l'autre était seulement bien parée. Pourtant il devait — ah oui : celle-ci était le devoir, mais l'autre était le plaisir : Marc Fournier avait déjà fait son choix. Car chacune était ou trop absorbante ou trop attrayante pour qu'il songeât à poursuivre les deux à la fois. Le départ. Le voyage. Et Lavinie... Lavinie, « Lavinia ».

— Avez-vous parlé, cher ?

— J'ai dit quelque chose, Edith? Oh, c'est que je pensais...

— Vous pensiez à votre Italie, nest-ce pas ?

Il la re2;arda. Elle tournait le dos à la fenêtre et il voyait mal ses traits : c'était comme si elle se fût déjà un peu effacée de sa mémoire et qu'elle ne fût plus

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