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Si 2 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

de vous... — je veux dire, parler et lui faire du tort, le Ciel me l'eût ordonné, que je ne l'aurais pas pu. Mais, iine fois que j'ai été décidé à garder le silence, chaque bouchée de votre pain que je mangeais, là, dans votre maison où je suis né, m'étranglait. Si j'avais pu seule- ment devenir fou à force de chercher ce que je devais faire ! Ce matin, j'ai cru qu'il fallait tout vous dire ou mourir. Et maintenant c'est fiiit. Et il me semble que je suis le plus vil des vers qui rampent, car j'ai trahi ma Dame !

Tresham. — Non... Gérard — non...

GÉRARD. — Laissez-moi m'en aller.

Tresham. — Un homme, tu disais ? quel homme ? Jeune ? pas un vulgaire manant ? quel vêtement ?

GÉRARD. — Un chapeau à grands bords, un grand manteau ample, étranger, un manteau sombre l'enve- loppe, complètement, on ne voit pas sa figure. Je le crois jeune. En tout cas pas un manant, à coup sûr.

Tresham. — Pourquoi ?

GÉRARD. — Il est toujours armé. Son épée sort sous le manteau.

Tresham. — Va, Gérard. Je ne soufflerai mot de ceci à personne.

GÉRARD. — Merci, merci. Monseigneur ! "

(Il sort.)

Tresham (arpente la pièce. Après une pause). — La pensée est une absurde chose. Il y a des faits mons- trueux qui, lorsque notre pensée les envisage, donne- raient un démenti à Dieu, en face de ce soleil et de ces étoiles, de ces eaux et de tous les verts délices de la terre. Je rencontre le fait monstrueux — et cependant

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