Page:NRF 14.djvu/728

Cette page n’a pas encore été corrigée

722 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

l'atmosphère, l'érotisme sournois des confessionnaux et des chambres de question.

Les deux comparses du bouc mélancolique ne se ressemblaient pas. L'un d'eux, d'une taille gigantesque et vêtu de rouge comme un bourreau, était nègre; l'autre, très petit et grassouillet était de race blanche. Il portait un coquet habit de bourgeois du règne de Louis XV, en camelot marron, avec un gilet de taffetas blanc aux broderies usées. Vu de dos, ses courtes jambes dépas- saient à peine les basques de son habit. 11 offrait l'aspect d'un hanneton pour cérémonies religieuses. Le nègre et lui regardaient avec intérêt la véritable foule qui mainte- nant envahissait le carrefour.

Un paysan que je reconnus vaguement agitait une cloche en corne à battant de bois.

— Bonjour, monsieur Pierre.

Je me retournai brusquement et j'aperçus le maire de la Croix-Cochard. II portait ses habits de travail : un gilet de serge noire, une culotte de velours gris, rapiécée et presque blanche par places.

— Bonjour, monsieur Mathurin-Mathieu. Quel bon vent?

— Chut, fit-il, un doigt sur ses lèvres rasées. Presque tous les cultivateurs du canton s'étaient

donné rendez-vous à ce sabbat. Ils se pressaient, res- pectueux et chafouins, les uns derrière les autres, pour aller présenter leurs hommages au Maître. Des vieilles femmes et de toutes jeunes filles se mêlaient à leurs groupes, toujours en habits de travail, je vis une femme assez élégante en robe d'été, avec un bonnet de laine sur ses cheveux blonds.

�� �