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622 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

atteindre et les corrompre, c'est une autre afl'aire.Mais nous pouvons les aider. Et eux aussi, soyez sûrs qu'ils peuvent nous aider.

JULES ROMAINS

��LES REVUES

��HOMMAGE A MOREAS

��La Revue critique des idées et des livres (25 mars 1920) élève à Moréas, pour le dixième anniversaire de sa mort, l'tioramage des compa}5'nons, des rivaux, des disciples : Barrés, Henri de Régnier, la comtesse de Nouilles, Frédéric Plessis, Emile Henriot, Jean Longnon...

Eugène Marsan écrit, sur la « vie temporelle » du poète :

« Ce n'est pas qu'il se répandît en propos étendus. Ce n'était pas sa manière. Il révélait en deux mots les secrets d'un poète, l'essence et le tour de main du géni'^ Il se taisait longtemps, et sortait de là par des paroles dont la circonstance et le ton faisaient surtout le prix. Après un long silence, il vous présentait soudain la conclusion. Vous perdiez pied, selon que vous éti^^z plus ou moins digne de l'entendre. Il demandait, par exemple, ce qui faisait la beauté d'u.i vers de Lamartine : « Hélas! la terre ainsi traîne tous ses poètes ». Et il se réjouissait tout bonne- ment de voir errer les gens. Un jour, Maurice de Noisay, qui se trouvait là, répondit que le trait de génie se trouvait, à ses yeux, dans le subs- tantif : terre, et le possessif : ses ; c'est-à-dire dans la personnification de la terre. Alors Moréas, tandis qu'une grande satisfaction se peignait sur son visage : « Allons, c'est bien... Je ne pensais pas qu'on aurait trouvé. »

��Et André Thérive :

« Le classicisme est aujourd'hui en poésie toute autre chose que le retour aux anciennes inspirations. C'est un symbolisme comme un autre, mais qui prétend suggérer avec les moyens de la langue française, et non pas sans elle ni contre elle.

Il peut résider dans les mots: Ainsi, survenant apçès tant de poètes qui ne quittaient point un sujet sans l'avoir expliqué à fond ou gâté par trop de richesse extérieure, Moréas a seul réussi cette prouesse, en respectant la lang.te, d ■ reprendre l'éternelle recherche de Racine, et de se rasseoir aux principes de La Fontaine : concevoir l'évocation comme incompatible avec trop de clinquant ornement, et la voix mys- tique qu'on doit entendre au fond de tout poème, comme étouffée par la déclamation trop bien ordonnée ; réduire les éclats ; prendre les mots généraux dans le sens prégnant, le sens plein et secret; sembler le plus simple, parfois le plus nu qu'il se puisse, pour laisser à ses hardiesses leur valeur, à la matière sa légère vibration spirituelle. »

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