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580 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

surprise est un don précieux à condition de trouver à s'exprimer autrement qu'au moyen de clichés. La poésie de M. Aragon est agencée comme les parcs d'attractions. C'est un genre d'amusement dont on se dégoûte assez vite. Du moins M. Aragon porte-t-il dans le procédé de tachisme verbal dont il se satisfait à présent, un soi- gneux désir de fraîcheur.

L'uniforme de secte — une secte assez mélangée — qu'il a cru devoir endosser, ne lui va pas mal, à cause des retouches qu'une fantaisie personnelle a faites au modèle réglementaire. Tout n'est pas affecté dans le charme aigrelet de cette attitude, mélange de précocité aisée et de jeune grâce naturelle.

L'auteur fait ses exercices de vision et àe rendu en public ; il nous livre le secret de son carnet de notes et de ses premières gammes. Mais, en dépit du soin scrupuleux qu'il met à désarticuler, selon les recettes de l'école, les membres de sa muse, vouée au rôle ingrat de la femme coupée en morceaux, on en reconstitue sans trop d'efforts la figure véritable :

Le corps fuit dans les draps mystérieux du rêve toute la fatigue du monde

le regret du roman de l'ombre Le songe où je mordais Pastèque interrompue...

Le son que rendent ces phrases a la qualité qu'il faut pour qu'on prenne la peine de déjouer l'artifice typographique, l'absence de ponctuation et autres ficelles où s'empêtrent les machinistes de « l'esprit nouveau ».

lis sont extraits d'un poème {Lever) dans lequel M. Aragon veut exprimer le trouble de l'adolescence, lorsqu'elle regarde craquer autour de soi la chrysalide de l'âge ingrat. Les images gracieuses y abondent :

Lycéen j'avais le Dimanche

Comme un ballon dans les deux mains

��Toutes les femmes sont trop peintes et portent des jupons trop propres

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