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MANNEaUIN d'acajou 357

couleurs. C'est le cheval que voudrait interroger l'enfant de la Troisième République, le bon écolier en sarrau noir épingle de la croix de fer blanc, culotté du velours retaillé dans un vêtement plus ample et qui distille la forte odeur des peines et plaisirs du père, le cocher- livreur qui transpire en ahannant sous les colis du che- min de fer et qui répand le trop-plein du canon de rouge quand il trinque, sa corvée terminée.

L'écolier connaît par cœur les mille et une nuits occi- dentales, inscrites en son Précis d'histoire de France, l'un des sommets du merveilleux vulgaire, après la poésie secrète et si exacte du Système Métrique, abstraite symphonie des poids, des volumes et des espaces.

Il sait que les guerres civiles déchirent et que les guerres de religion désolent. Aucun professeur d'histoire ne s'exprime autrement, parce que ces maîtres sont les prêtres bons gardiens des mots gros de magie. Or, la religion s'en va, tout le monde le dit. Alors, en deçà des frontières, plus de guerre ? C'est le progrès ! Reste la guerre civile. Pourtant, les journaux socialistes im- priment que ce ne sera pas encore pour cette fois-ci. Pourtant, la Garde Républicaine et les dragons joufflus, au triste écusson noir et blanc, campent toujours dans les rues mal pavées, en étoile autour du carrefour orgueilleux de son candélabre d'un luxe inouï. Tout ce qu'on ne dit pas, tout ce qu'on sait mal est inscrit dans l'œil du cheval, rond, convexe et noir, tout à fait pareil au miroir noir des paysagistes de i83o.

Le coq noir du charbonnier, à la crête inclinée comme une casquette, faisant le tour d'un stère de bûches, se promène dans l'œil du cheval.

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