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L ISOLEMENT 247

Léopoldville-Kinchassa. Le ciel aussi que je connaissais bien pesait lourdement sur mon avenir de quarante-huit heures ; je n'aurais qu'à lever les yeux vers cette plaque bleue pour éprouver sur mon visage que je sentais se friper à Tair chaud, tout le poids énorme de ce plafond du vide lumineux et humide d'une humidité qui le rendait palpable.

A Léopolville-Kinchassa seulement je verrais des arbres. Avant de traverser le Fleuve Congo, dont il faut couper le courant sur un bac à vapeur pour atteindre Brazzaville j'attendrais sur la berge, à côté de ma cantine, la visite de la douane belge.

Je suis sur la berge, le derrière sur ma cantine et machinalement, sans m'en rendre compte, mon index de la main droite dans l'anneau de fer qui rassemble mes clefs, je fais tourner celles-ci autour de mon doigt. Les coudes aux cuisses, la poitrine inclinée, je regarde Brazza- ville. La ville est, à ma gauche, un amas de maisons basses construites en planches consolidées de petites pièces de fer blanc qui brûlent l'œil, et elles me font penser aux logis des zoniers de Paris, ces logis qui vibrent au choc du bruit du tramway qui passe ; une église de briques pèse sur leurs toits de toute sa masse rouge ; à ma droite, comme si elles pointaient toutes de la cime du même arbre énorme et toufifli, les toitures de paille des cases européennes tachent de jaune une verdure massive qui noircit de son ombre l'eau du fleuve au long de la berge. Ces toitures sont tout ce qu'on voit des cases européennes depuis la rive belge. Le nouveau venu, pendant l'attente du douanier belge, se dit en les apercevant : " C'est là que je trouverai un logis... bien sûr que sous ses toits de paille vivent les blancs ainsi qu'il me paraît de ces

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