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212 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

oflFert alors un petit paquet de dattes ; j'ai refusé, en disant que Jacques ne pouvait pas les manger, et que moi je ne les aimais pas. Elle a tellement insisté que j'ai* fini par les prendre en disant que je les donnerais à Madame Mascar ; j'ai regretté ensuite d'avoir été si peu aimable. Le médecin m'a recommandé de ne pas fatiguer Jacques, et de ne pas chercher à lui parler. Je me suis aussi défendu de penser à rien d'autre qu'à ceci, que je me répétais : " Il faut que Jacques vive ".

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��Il me dit souvent les rêves qu'il fait. Mais il ne répond pas volontiers à mes questions : ainsi je ne peux arriver à savoir au juste s'il a des étouflFements. On dirait que sa maladie ne l'intéresse pas ou plutôt lui fait honte.

Il ne songe pas aux choses les plus simples, pourtant il s'attache à des détails auxquels je ne croyais pas qu'il tînt à ce point. Dans ses moments les plus inconscients, il est encore très sensible aux défauts qu'il me reprochait : comme à certains mots ou à mes façons de parler qu'il appelait trop autoritaires. Parfois, même dans l'obscurité, il me dit : " Ne fronce pas les sourcils comme ça " ; je crains d'avoir pour lui, quand je fronce les sourcils, une expression mesquine ou dure.

Le médecin lui a fait des ventouses scarifiées. Avant qu'il ait commencé, j'ai été inquiète et je lui ai demandé: " Vous ne vous servez pas d'un scarificateur ? " Il a répondu : " On ne s'en sert plus. — Pourtant c'est plus simple qu'avec un bistouri. Dans les hôpitaux de Paris..."

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