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130 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

surcroît comme son dépôt spontané, comme un bien qui ne s'obtient que par des qualités de probité et de patience.

Le goût passionné que les esprits les plus ingénieux et les plus fins professent pour Stendhal tient moins peut-être à ce qu'il est pour eux matière à lecture et à réflexions constantes qu'à ce qu'il leur représente l'idéal de la vie voluptueuse, in- telligente et libre qui pour un français bien né, parfois très catholique, mais peu chrétien, figure le bien suprême de la terre. Dans l'état actuel de cette terre, ce bien, se demande M. Maurras, est-il encore possible ? Et il répond: Non. Il n'est plus possible parce que nous sommes moyens et non plus fins, parce que nous sommes requis tout entiers jusqu'à la pointe de notre plaisir et jusqu'à la fleur de notre pensée pour un service national. Le service national, ou, mieux, le nationa- lisme intégral pouvait admettre avant 1914 certains jeux que, dans l'état actuel du monde, il ne pourra plus tolérer de longtemps.

" Il faut choisir, de Miltiade ou d'Augustule. Nous n'avons même pas affaire à des conjonctures qui permettraient un choix véritable. Les choses ont choisi pour nous. Si les choses sont telles, si, par exemple, l'armée doit embrasser toute la nation : la guerre, intéresser et offenser la totalité du corps social ; si l'existence et les biens de chacun et de tous (et non seulement leurs éléments communs) sont mis en question par l'agresseur et par l'envahisseur ; si les chocs des nations, jadis politiques et militaires, visent à présent l'économie, autrement dit la maison et la vie privée ; si le domaine public va tout envahir : la mise en garde devra mobiliser dans les mêmes proportions tout notre privé à moins que nous soyons résignés à périr.

" La garantie de la liberté de chacun comportera une ser- vitude de tous. Et vraiment tous, jusqu'au dernier; autant que la jeunesse, la vieillesse ; autant que le mâle adulte, la femme et l'enfant ; autant que le matériel mihtaire, industriel et domestique, le spirituel des écoles et des corps savants, théâtres, salles de conférences, livres, journaux. Plus de cénacles retranchés, ni d'académies inactives ; plus de bois

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