Page:NRF 13.djvu/880

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Rien n'en dépasse que cette Ombre
Droite, barrée d'un trait,
Dont les vieilles religions rappellent la douleur d'être :
La croix — le jaillissement plus
L'obstacle qui barre —
A jamais dressée sur chaque homme
Et qui, lorsqu'il s'est enfoncé sous terre,
Devenue visible, seule dépasse.

Les voilà, les croix blanches, rang par rang,
En grand nombre, bien comptées,
Comme une troupe qui avance encore.
Des chiffres, des noms sont sur chaque croix.
Le sol est net et bien sablé.

Ô vous, qui maintenant gisez
Sourds et aveugles, laissez bien
Dissoudre les jointures de vos membres ;
Déposez éloquemment
Non plus des mots, mais vos mâchoires ;
Ouvrez le creux de vos poitrines
Où la terre entre par dessous.
Dans l'épais continent laissez
Vos entrailles et vos trouvailles :
Le premier goût d'une côte de France apparue
Suave, changeant de côté
          ainsi qu'un bonbon dans la bouche.