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684 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

que ce grand ennui, qui est de s'ennuyer de soi-même.

Quand je vous ai quittée, Pensée, c'est alors que vous vous êtes emparée de moi. Chaque jour. Chaque nuit le même rêve après les premières heures de sonmieil. La même Pensée.

On me remontrait une expression de votre visage,

Une inflexion de votre voix, un mouvement de votre corps, ce corps féminin, si amer, si intelligible pour moi I

Il y avait un cri dans la nuit, votre voix que je recon- nais entre toutes les autres !

Il y avait une forme chancelante quelque part qui me tendait les bras ! il y avait quelqu'un d'aveugle qui m'ap- pelait ! quelqu'un de taciturne et qui ne me répondait pas.

PENSÉE. — Si je chancelle, Orian, c'est parce que vous n'êtes pas là pour me tenir. Et je ne suis aveugle que parce que je ne puis pas vous voir.

ORIAN. — Puis

Tout cela même a été mis de côté et de vous à moi s'est établi quelque chose de plus direct. Il y avait quelque chose en moi qui tenait à se séparer de moi-même.

Alors, j'ai connu un autre désir.

Sans image ni aucune action de l'intelligence, mais tout l'être qui purement et simplement

Tire et demande vers un autre, et l'ennui de soi-même, toute l'âme horriblement qui s'arrache, et non pas ce brûlement continu seul, mais une série de grands efforts l'un après l'autre, comparables aux nausées de la mort qui épuisent toute l'âme à chaque coup et me laissent aux portes du Néant !

J'ai tenu bon cependant, et quand j'aurais voulu revenir, le bateau était là qui m'emportait. Demi-pause.

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