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600 LA NOUVELLE REVISE FRANÇAISE

une histoire d'amour intéressante, et, pour la concierge, s'applique aussi bien à celle qui se passe au sixième de son immeuble qu'à celle qui se déroule dans le rez-de-chaussée de son journal. Il y a quelques années, l'Eclair publiait des réponses de soldats à des questions d'histoire posées par leur capitaine (le journaUste qui les trouvait absurdes ne révélait que sa propre absurdité). Interrogé : a Qu'est-ce que l'Algérie ? » Dumanet avait répondu : « C'est où il y a des zouaves. » Un roman, en français, c'est où il y a de l'amour. Ne vous étonnez pas que M. Benoît ait écrit des romans en français.

Entendu. Mais notez — et c'est là que je voulais en venir — que dans les romans d'aventures, qui forment jusqu'ici un genre réel, ordonné, abondant, avec sa manière, ses limites et ses lois propres, l'amour ne tient jamais aucune place, sinon par hasard et trèsépisodiqueet banale. Le roman d'aventures exclut l'amour comme la tragédie classique excluait le personnage d'un mari trompé. Aussi, dans un certain français, n'est-ce pas un roman, pas plus que les Provinciales n'étaient un pamphlet pour le juré de Paul- Louis Courier. Etant gamin, je demandai, un dimanche, à la vieille demoiselle qui tenait la bibliothèque paroissiale un roman de Jules Verne. Elle était entourée de quelques assistantes, consœurs en sainte Catherine, qui se mirent à rire, et leur chef me déclara : « Je vais vous donner un livre de Jules Verne, mais si c'était un roman je ne vous le donne- rais pas. » Telle une cigarette en chocolat n'est pas une ciga- rette. Je fus humilié d'avoir été surpris en flagrant délit de foUe des grandeurs, ne me doutant pas que j'utiliserais beaucoup plus tard la leçon de sémantique de l'académie en jupons.

Précisément, dira-t-on, leur meilleur public, les romans d'aventures le trouvent chez les enfants et les adolescents. L'intérêt et les convenances commandent aux auteurs de

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