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580 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Est-ce qu'on est jamais assez grand pour se passer de père ? Est-ce que Nous serons jamais assez vieux pour Nous passer de fils ?

Ah, que l'un seul d'entre eux périsse, c'est un malheur assez grand pour que l'amour de tous les autres ne suffise pas à Nous en consoler !

Et qui, sinon ces ingrats, me donnera ma postérité, la race qui en Notre Successeur sera la future Eglise ?

LE FRÈRE MINEUR. — Priez.

LE PAPE PIE. — Si encore Nous comprenions ce qui les éloigne de Nous !

Hélas, si ce qu'ils proposent à la place de ce que Nous savons avait quelque beauté ou quelque vraisem- blance !

Mais jamais le vieux Déprédateur ne s'est mis moins en peine de cacher son hameçon.

Ce n'est plus avec le plaisir qu'on les pêche, ou le fruit qui fait devenir comme Dieu,

Mais avec la mort toute nue, et le désespoir, c'est cela qu'on leur promet, et le Néant, c'est cela qu'on leur dit qui existe !

Pour Nous, il n'est pas en Notre pouvoir que ce qui est vrai soit faux.

LE FRÈRE MINEUR. — Saint Père, si vous étiez auprès de chacun d'eux, comme vous êtes en ce moment près de moi, sans doute qu'ils vous entendraient.

LE PAPE PIE. — Où sommes-Nous donc, petit frère ?

LE FRÈRE MINEUR. — Ils ne vous voient que sur votre trône au milieu des épées flamboyantes, le front ceint de la triple couronne et fulminant l'excommuni- cation.

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