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536 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

cette impression solennelle, cette température divine, cet air sur ma face, cette caresse sur mon corps nu dont je sens toutes les variations, ^

Par quoi s'annonce la Nuit,

Désirée de beaucoup, comme moi, je désire le jour !

La vigne aussi, eh bien, où sont ses yeux ? Et auprès d'elle qui est-ce qui connaît le soleil? C'est de lui qui sont faites ces grappes à mes tempes !

Les autres autour de moi, toutes ces personnes.

Qu'est-ce qu'ils savent dés choses, n'en prenant bien vite que ce qui leur est nécessaire, deux cHns d'œil pour se guider au travers de leur petite comédie?

Mais moi, tout me parle, tout me touche jusqu'au fond du cœur.

— Cette voix par exemple que j'entends.

SICHEL. — Je n'entends point de voix, ma fille.

PENSÉE. — Tu ne l'entends pas, ma mère, mais moi, je l'ai entendue. Il a cessé de parler et je l'entends encore. Il parle et mon âme tressaille de l'entendre.

SICHEL. — Pensée, qui est-ce ?

PENSÉE. — Qu'importe ? Il n'a point de nom. J'ai entendu seulement cette parole qui parlait.

SICHEL. — Pensée, qui est-ce ?

PENSÉE. — Et que veux-tu savoir, quand lui-même ne sait rien encore ? Heureuse que je suis! C'est lui qui m'a choisie ce soir entre toutes les autres jeunes filles, sans qu'il le sache.

SICHEL. — Et c'est cela tout à l'heure qui t'a causé une émotion si vive ?

PENSÉE. — J'ai perdu mes repères quelque peu.

SICHEL. — Je n'étais pas loin de toi.

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