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44^ LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

ce qu'ils livrent une bataille éternelle, un étemel festin, et les batailles d'un éternel amour... Mépris de quoi ? Mépris au fond de ce que les dieux ne sont point périssables... mépris de ce qu'ils demeurent et de ce qu'ils ne passent point. Mépris .de ce qu'ils recommencent tout le temps et non point comme l'homme, qui ne passe qu'une fois... Mépris de ce qu'ils n'ont point la triple grandeur de l'homme, la mort, la misère, le risque... de ce qu'ils sont assurés de ne pouvoir devenir aussi grands qu' Œdipe.., »

Accepter de vieilUr, accepter d'être un homme, n'est-ce pas la plus sûre grandeur de Hugo ? « Ce n'est pas par hasard que sur tant de points nous en revenons toujours à lui. » Nous l'avons bien senti tout de suite : « Leconte de Lisle, Hugo, deux systèmes en ces deux hommes... L'un vieillissait vieillard, l'autre vieiUissait vieux... Tout ce que les paysans de votre pays mettent dans ce mot : un vieux, tout ce qu'ils y mettent de noueux, de racine, de ayant résisté^ de ayant poussé, de ayant vieilli, de ayant tenu le coup..., c'est tout cela qu'il faut laisser dans le mot et dire du vieil Hugo : C'était un vieux. Il laissait à l'autre le soin de porter le monocle et d'être un Olympien. Lui il portait ses deux yeux, les yeux, aux lourdes paupières, avec deux poches dessous, les yeux, sinon les plus profonds, du moins les plus profondé- ment voyants qui se «soient jamais ouverts sur le monde charnel... Il était un homme, simplement (c'était lui, le mangeur de bœuf), un vieil homme à l'écorce ridée. Il savait ce qui éclate partout dans Homère, qu'il y a plus dans un homme que dans un dieu qui étonne au loin. Et passible, il ne voyait aucun inconvénient à laisser Leconte de Lisle impassible poursuivre sa carrière de vieillard et de Dieu... Ni pareillement à lui laisser la philologie, l'archéologie : « Ni archéologie, ni philologie romanes, voilà le secret d'Aymé- rillot et du Mariage de Roland. Ni archéologie, ni philologie hébraïques, voilà le secret de Booz endormi. »

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