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358 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

ANTON IN. — Quelle sera ta fonction ? Quelle idée divine y a-t-il sur toi ?

GÉRARD. — Que je sois aviateur, et puis ingénieur, constructeur.

ANTON IN. — Des choses seront changées à cause de toi. A cause de toi il y aura dans le pays quelque chose d'augmenté, quelque chose de mieux au point, quelque chose de plus voisin de la perfection. Et les gens passent dans la rue vaine, et ils te croisent avec indifférence, sans songer que dans la vie de leurs enfants, des choses dépendront de ce que toi, aujourd'hui, 3 mai, dans les Champs-Elysées, en arrivant à la Concorde, tu as dit ceci plutôt que cela. — Allons, et maintenant, il faut que je te quitte.

GÉRARD. — C'est vrai ?

ANTONIN. — Recommençons à être habile.

GÉRARD. — Nous pouvons rester encore à causer cinq minutes. Cinq minutes, ce n'est pas long.

ANTONIN. — Quelquefois.

GÉRARD. — Je vais te raccompagner.

ANTONIN. — Je pars, mais quelles que soient les épreuves par lesquelles je doive passer, sois sûr que je ne compte pas sur ta pitié. Quand le hasard de la guerre m'eut versé d'abord dans le Ravitaillement, et que, quittant ma table de travail pour la besogne des ma- nœuvres, je chargeais les auto-camions sur la route de Nancy, quand la terre devant moi était couverte des gouttes de ma sueur, et qu'il fallait suivre la machine au-delà de mes forces et que parfois je m'appuyais au mur, oui, je m'appuyais au mur d'épuisement, il ne s'est trouvé qu'une personne, jl ne s'est trouvé que toi pour mo

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