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l80 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

des chaises, iJ n'a jamais accepté, il n'a jamais reconnu que cette partie de la carcasse qui se nomme le cerveau ne se conduisît pas et ne fût pas aux ordres comme cette partie de la carcasse qui se nomme les doigts de la main. Comme ses ancêtres (immédiats) (anciens et immédiats) (lointains et immédiats) travaillaient dans les vignes et dans les moissons des seize, dix-huit heures par jour, dans les pleins jours d'été, dans les grands jours de juillet, d'août et de septembre, de la première aube qui est presque à deux heures du matin jusqu'au dernier crépus- cule qui est presque passé neuf heures du soir, ainsi il voudrait continuer, il voudrait en faire autant, lui aussi il voudrait faire des coups de force. De là les accidents. Il voudrait faire des drames et des tapisseries, des dia- logues et des notes comme on rempaille des chaises, et que la ligne vînt après la ligne et le vers après le vers conMne le cordon venait après le cordon L'insensé. Il voudrait faire à sa table de travail, sur ces soixante-dix décimètres carrés recouverts de grosse toile verte, ce que ses ancêtres ont fait dans les immenses plaines du Val et sur les côtes de Saint- Jean-de-Braye : des journées sans nombre et des journées sans limites. Des journées pour ainsi dire sans vieillissement. Des journées sans limitations que les limitations mêmes du soleil. Des journées où c'était le vigneron qui fatiguait la vigne, où l'échiné lassait le cep, où le moissonneur épuisait la moisson. Je dis plus : où le moissonneur lassait la moisson. Des journées où l'homme lassait la terre. Où l'homme lassait l'âge, et tout ce qu'il y a d'étemel. Voilà ce qu'il voudrait faire, le sot. Il n'accepte pas sa déchéance. Il sait, mais il ne veut pas savoir qu'il y a dans la plume un virus qu'il n'y

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