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NOTES ^^79

tudes, il convient que nous nous en tenions à la seule réalité, au moi. »

Chacun poursuit de façon singulière le roman de la vie intérieure. Bergson a une imagination trop rêveuse pour s'abandonner comme l'artiste à la volupté de la minute pré- sente ou foncer,- tête baissée, sur l'avenir et épuiser tous les modes de sentir. Que d'autres demandent aux voyages, aux musées, aux rencontres humaines le renouveUement de leur ferveur. Indifférent à l'action, U dirait volontiers avec Rimbaud qu'elle a n'est pas la vie, mais une façon de gâcher quelque force, un énervement ». Un songe dont la trame se fait et défait sans cesse, où rien ne commence et rien ne finit, le libère du monde et le convie à une fête spirituelle. L'attrait d'une vie lente et profonde s'accroît de l'inquiétude quinaîtdela mobiUté d'images tôt évanouies. L'être se défend avec une obstination douloureuse contre l'impression qu'il a de devenir étranger à lui-même. Il se tourne vers le passé, solUcite ses souvenirs, les ordonne et les recompose. Il acquiert ainsi la conviction qu'un même mouvement les parcourt qui soustrait la personne à l'écoulement des choses. Mais, à se concentrer sur eUe-même, la sensibiUté se retire de l'intéuigence et en démasque l'artifice. Les idées perdent leur pouvoir évocateur; la logique, où Tellier ne voyait déjà qu'une maladie ie la pensée, cesse de sembler génératrice du réel et se réduit aux proportions d'un jeu formel où la subtilité s'affine. Les grands systèmes métaphysiques, impuissants à retenir la vie dans la maUle des concepts, ne sont plus qu'une leçon d'éristique. Et, défiant dans son propre goût pour la spéculation, Bergson repousse la médiation des philosophes et communie avec les poètes dans une certitude sentimentale, r Or une science envahissante et audacieuse compromet leur quiétude. Non contente des attributions techniques et du rôle utiUtaire qu'on lui accorde communément, elle pénètre dans le domaine du rêve. Là elle dénonce comme illusoires

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