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I006 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pouvoir plus dissolvant que fécondant : Les théories les plus ingénieuses, dit-on, ont toujours le grave tort de se manifester avant l'œuvre définitive. Encore que ce rai- sonnement ne nous dérange pas, puisque nous pensons que les théories, menant à l'oeuvre définitive, il est néces- saire qu'elles la précèdent, nous nous demandons quelle est la production qui a jamais semblé « définitive » dès sa parution ?

Certains, parmi les critiques qui nous admonestent, ont des cheveux blancs. Leurs vœux impatients flattent, certes, mais étonnent les artistes dont nous sommes, qui, n'ayant dépassé la trentaine que depuis peu d'années, se voient tout à coup sommés de donner des preuves définitives de leiu savoir, alors que jusqu'ici un tel exemple ne leur semble pas encore avoir été fourni par leurs difficiles aînés.

Pour bien comprendre de quelle utilité sont les théories pour le jeune peintre,il faut réaliser la situation terriblement embarrassée qui lui est faite depuis l'impressionnisme. Il est environné d'énormes dangers, de tentations opposées, envahi de mauvaises habitudes, de tics attrapés à lutter contre des fantômes qu'il prit souvent pour des périls véritables, tellement le brouillard qui l'enveloppe est opaque. De plus, et c'est ce qui fait le pathétique de sa situation, il est enlisé sous les théories les plus contradic- toires, les plus obscures, les plus basses, qu'amoncelle inlassablement sur sa tête un public qui veut à tout prix penser pour lui. Les injonctions les plus dénuées de bon sens, les souhaits les plus Httéraires, les desiderata les plus inopportuns assaillent de tous côtés l'artiste et revêtent invariablement la forme qu'on reproche à ce

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