Page:NRF 11.djvu/135

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHRONIQUE DE CAERDAL I29

Toute grandeur d'art est simple en son effet, et complexe en sa nature. Le trait est direct, mais il ne vient pas de si près qu'on pense. Les moyens ne sont pas compliqués, et les causes le sont étrangement.

En art et dans la vie intérieure, la vraie force n'est qu'une apparence, si elle n'est pas profonde. L'âme est sise dans la profondeur. Elle s'y nourrit I non moins qu'elle s'y cache. Dans le sens de la I profondeur, pour une seule tige qui pousse sa flèche, cent racines s'enlacent, tracent des chemins sous la terre et puisent la sève en des lieux diffé- rents.

La plus simple vie est un prodige d'intrigue et de complication. Les grandes œuvres d'art tiennent de la nature par cette analogie encore. La fable d'Hamlet est sans détours et sans replis. Le trait principal de l'action n'a pas moins de force que de simplicité : un fils qui venge le meurtre de son père, et qui passe du soupçon à la certitude, puis à la vengeance. Mais ce qui serait fort simple dans un fils ordinaire cesse de l'être dans un caractère profond. L'Oreste antique est tout uni : deux sentiments le partagent, l'un même étant de l'action plutôt que du caractère, puisqu'enfin le destin arme le héros pour la vengeance et l'oblige à î l'accomplir malgré lui.

Il se trouve que le prince de Danemark est un poète, riche de toute la pensée humaine. Le fils

�� �