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LES REVUES I O9 I

pas m'être levé plus tôt. Je travaille jusqu'à 6 heures à peu près, à moins que des visites ne m'interrompent, ce qui m'arrive plus que je ne le voudrais. Je vais dîner alors dans le monde, je fais cinq ou six visites jusqu'à minuit, puis je me couche. La société m'est devenue plus nécessaire qu'elle ne me l'était autrefois, ce qui est une preuve que je vieillis, et comme le seul moyen de voir du monde est de dîner chez les gens, j'ai pris ce parti. Voilà de compte fait vingt- quatre jours de suite que j'accepte des invitations. Les lampes me fatiguent, et les dîners me font mal. Mais ce sont des inconvénients inséparables de la vie de Paris. La conversation est restreinte, et tant soit peu gênée. Cependant on s'en tire, et ce bruit de la société chasse l'espèce de mélancolie qui s'empare de moi quand je passe tout un jour dans la solitude. J'achève mon histoire des religions anciennes, ou pour parler plus exactement, je l'avance, car je ne sais encore bien précisément quand elle sera achevée. Mon temps se passe vite, et le présent serait tolérable, s'il n'y avait pas d'avenir — je ne désespère cependant pas de l'avenir, comme vous en déses- pérez pour moi, et comme je n'en exige pas grand chose je ne serai peut-être pas trompé. J'ai un besoin de repos et de vie domestique, qui me donnera la force de l'atteindre avant que le moment soit passé. C'est sans pouvoir méjuger complètement qu'on m'accuse de faiblesse. Il faudrait avoir été dans mes circonstances pour savoir ce qu'on aurait fait, et je le dis dans la plus profonde conviction, je crois que pour faire mieux, il aurait fallu valoir moins.

�� ��Les Lettres consacrent leur numéro du 1 5 Avril tout entier à une étude de M. René Johannet sur V Evolution de Georges SoreL En voici la conclusion :

Esprit bizarre et carré, lourd et subtil à la fois, dur et capiteux, plus qu'indigène, né de la terre, que vous êtes rare et insoupçonnable! Cette Soltditât impassible que Goethe saluait dans les anciens, revit en vous, mais passionnée et nébuleuse, suspendue entre ciel et terre et pleine de chants, comme la Cité des oiseaux. Par tous vos mouve- ments vous éludez nos tristes pièges et tout ce que vous touchez se transforme. Là où vous êtes passé l'atmosphère prend une teinte plus riche et la matière s'enorgueillit, comme d'être soudain jetée

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