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D’UNE PARISIENNE

— Vous connaissiez Madeleine Brohan ? elle a habité dans le pays ?

— Mam’zelle Madeleine ! s’écrie l’homme, mam’zelle Madeleine… si je la connaissais ! Mais je demeurais tout près de leur maison, vous savez bien, à deux pas, le grand portail brun qui est ombragé par un gros mûrier.

« J’ai été à la communale avec elle ; j’étais plus jeune de deux ans, mais c’était moi tout de même qui portais son panier. Et sa mère, mame Suzanne, et sa sœur, mam’zelle Augustine ! Ah ! les bonnes femmes, si charitables ! et elles, les deux sœurs, si jolies, des beaux brins de filles, allez !

La glace est rompue, le pauvre vieux me conte tout ce qu’il sait, la propriété des Brohan, vendue depuis trente ans à des amis, les Doré ; il me parle de la tombe du cimetière où reposent déjà Suzanne et Augustine et aussi l’aïeule maternelle ; il me dit, en apprenant la mort de « mam’zelle Madeleine », sa peine grande de rustre en qui la vision de cette belle créature était demeurée, seule envolée vers l’idéal de cette âme de terrien.