Page:Musset - Premières Poésies Charpentier 1863.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si ! vous parliez franc.

Rafael.

Si ! vous parliez franc.Non. L’avez-vous bien pu croire ?
Vous me faisiez, un conte, et j’ai fait une histoire !
Calmez-vous. — Je vous aime autant qu’au premier jour,
Ma belle ! — mon bijou ! — mon seul bien ! — mon amour !

Camargo.

Mon Dieu ! pardonnez-lui, s’il me trompe !

Rafael.

Mon Dieu ! pardonnez-lui, s’il me trompe !Cruelle !
Doutez-vous de ma flamme en vous voyant si belle ?
Il tourne la glace.
Dis, l’amour, qui t’a fait l’œil si noir, ayant fait
Le reste de ton corps d’une goutte de lait ?
Parbleu ! quand ce corps-là de sa prison s’échappe,
Gageons qu’il passerait par l’anneau d’or du pape ?

Camargo.

Allez voir s’il ne vient personne.

Rafael, à part.

Allez voir s’il ne vient personne.Ah ! quel ennui !

Camargo, seule un moment, le regardant s’éloigner.

— Cela ne se peut pas. — Je suis trompée ! Et lui
Se rit de moi. Son pas, son regard, sa parole,
Tout me le dit. — Malheur ! Oh ! je suis une folle !

Rafael, revenant.

Tout se tait au dedans comme au dehors. — Ma foi,
Vous avez un jardin superbe.

Camargo.

Vous avez un jardin superbe.Écoutez-moi ;
J’attends de votre amour une marque certaine.

Rafael.

On vous la donnera.