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que la tête me tourne. Est-ce qu’il l’épouserait tout de bon ? Holà ! dame Pluche, dame Pluche ! N’y a-t-il donc personne ici ? (Entre un valet.) Courez après le seigneur Perdican ; dites-lui vite qu’il remonte ici, j’ai à lui parler. (Le valet sort.) Mais qu’est-ce donc que tout cela ? Je n’en puis plus, mes pieds refusent de ne soutenir.

(Rentre Perdican.)
Perdican

Vous m’avez demandé, Camille ?

Camille

Non, — non.

Perdican

En vérité, vous voilà pâle ; qu’avez-vous à me dire ? Vous m’avez fait rappeler pour me parler ?

Camille

Non, non. — Ô Seigneur Dieu !

(Elle sort.)



Scène VIII.

(Un oratoire.)
Entre Camille, elle se jette au pied de l’autel.

M’avez-vous abandonnée, ô mon Dieu ? Vous le savez, lorsque je suis venue, j’avais juré de vous être fidèle ; quand j’ai refusé de devenir l’épouse d’un autre que vous, j’ai cru parler sincèrement devant vous et ma conscience, vous le savez, mon père ; ne voulez-vous donc plus de moi ? Oh ! pourquoi faites-vous mentir la vérité elle-même ? Pourquoi suis-je si faible ? Ah ! malheureuse, je ne puis plus prier !

(Entre Perdican.)
Perdican

Orgueil, le plus fatal des conseillers humains, qu’es-tu venu faire entre cette fille et moi ? La voilà pâle et effrayée, qui presse sur les dalles insensibles son cœur et son visage. Elle aurait pu m’aimer, et nous étions nés l’un pour l’autre ; qu’es-tu venu faire sur nos lèvres, orgueil, lorsque nos mains allaient se joindre ?

Camille

Qui m’a suivie ? Qui parle sous cette voûte ? Est-ce toi, Perdican ?