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Au moment où cette conversion miraculeuse s’opéra, je reçus de M. de Salvandy, ministre de l’instruction publique, une mission littéraire pour Venise. Il s’agissait d’explorer les archives de la république, et d’y recueillir des documents relatifs à l’histoire de France. La mission était de six mois ; mais je restai à Venise une année entière. Notre oncle Desherbiers, dans la carrière administrative depuis plus de trente ans, occupait la modeste sous-préfecture de Mirecourt. Je proposai à mon frère de rendre une visite à ce bon oncle. Nous partîmes de Paris ensemble, dans les premiers jours de mai 1845, pour Mirecourt, où nous restâmes environ deux semaines. Je me rendis ensuite à Épinal, d’où je gagnai Venise par Munich, Inspruck et Trente. Alfred demeura dans les Vosges pendant la moitié de l’été, voyageant de Mirecourt à Épinal et d’Épinal à Plombières, fêté par les bonnes gens de la Lorraine et recherché par la famille aimable du préfet du département.

J’étais à Venise depuis près de six mois, lorsqu’un soir de novembre, un Français de beaucoup d’esprit, M. de Trobriant, m’aborda sur la place Saint-Marc pour me parler avec enthousiasme d’un proverbe qu’il venait de lire dans la Revue des Deux-Mondes : — Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée. Je m’empressai de chercher la livraison qui contenait ce proverbe. À la distance où j’étais, et après une longue absence,