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Voici un autre mot où l’on reconnaît que l’enfant parle avec connaissance de cause. Il avait commis je ne sais quelle peccadille, et sa jeune tante Nanine, pour laquelle il avait une tendresse toute particulière, lui déclara que, s’il continuait ainsi, elle ne l’aimerait plus.

« Tu crois cela, lui répondit-il ; mais tu ne pourras pas t’en empêcher.

— Si fait, monsieur, » reprit la tante.

Et, pour donner plus de poids à cette menace, elle prit l’air le plus sévère qu’elle put. L’enfant un peu inquiet la regardait avec attention, épiant les moindres mouvements de sa physionomie. Au bout de quelques minutes, il remarqua un sourire involontaire et s’écria : « Je te vois que tu m’aimes ! »

Une autre faute, apparemment plus grave que la première, l’avait mené un jour jusqu’au cabinet noir. À son âge, quand pareil malheur m’arrivait, je ne bougeais pas plus qu’un terme et je supportais la prison avec l’entêtement de l’orgueil ; mais lui, à peine enfermé, il se mit à gémir comme s’il eût été au carcere duro.

« Que je suis malheureux ! s’écriait-il, ai-je bien pu mériter d’être puni par une maman si bonne et qui m’aime tant ! Il faut donc que je sois bien méchant, puisqu’elle est fâchée contre moi ! Comment faire pour qu’elle me pardonne ? Oh ! le vilain enfant que je suis ! C’est le bon Dieu qui me punit ! »