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ouvrage. Le lendemain quelques vers étaient déjà sur le papier. Par malheur il rencontra un peintre de ses amis, homme fort instruit, qu’il consultait souvent. Il lui parla de ce sujet dont il avait la tête toute pleine. L’artiste eut l’imprudence de dire que le personnage de Judith pouvait bien représenter la maîtresse d’Allori, mais que la figure d’Holopherne n’était point le portrait du peintre. Il alla jusqu’à soutenir que cette tête d’homme ne signifiait rien. Alfred se fâcha ; il se tint pour offensé personnellement des doutes sur l’authenticité du portrait d’Allori. Cette brouille dura trois semaines ; — c’est une de ses plus longues rancunes. — La paix fut signée un soir, en causant peinture ; mais le poète impressionnable, désenchanté de son sujet, laissa de côté Judith et Allori. C’est ainsi que, bien innocemment sans doute, un ami fit avorter cette œuvre qui promettait d’être belle et intéressante. Cela est d’autant plus fâcheux que l’ami se trompait. Le portrait de Cristofano Allori peint par lui-même, qui se trouve au musée des Offices, est bien exactement la même figure que la tête d’Holopherne du palais Pitti[1]. Voici tout ce que j’ai pu retrouver des vers que mon frère avait déjà improvisés, en composant le plan de cet ouvrage :


  1. Je l’ai vérifié, pour la seconde fois, dans mon dernier voyage à Florence. Ce portrait porte le n° 263.
    P. M.