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était, d’ailleurs, un moyen de faire parvenir jusqu’à son ingrate l’expression de son chagrin et de ses regrets. Un soir, en rentrant vers minuit, par un temps affreux, j’aperçus dans la chambre de mon frère tant de lumières que je le crus en nombreuse compagnie. Il écrivait la Nuit de décembre. C’est à l’épisode qu’on vient de lire que se rattache cette poésie empreinte d’une si profonde tristesse. Le lecteur doit y reconnaître que le poète a bu un nouveau calice. Cette peinture de la solitude, cette création de la pâle figure vêtue de noir, qui ne se montre que dans les moments de souffrance et d’abandon, tout cela ne pouvait sortir que d’une situation nouvelle et d’un malheur récent. Je sais que beaucoup de lecteurs ont cru voir, dans la Nuit de décembre, un retour sur les souvenirs d’Italie et une sorte de complément à la Nuit de mai ; c’est une erreur qu’il importait de rectifier. Il importait de ne point laisser de place à un doute sur le passage de cette poésie, où l’amant abandonné adresse des reproches à une femme qui ne sait pas pardonner. Connaissant la vérité, je ne pouvais point permettre de confusion entre deux personnes très différentes, dont une seule avait quelque chose à pardonner et le droit de refuser son pardon. Voilà pourquoi j’ai dû parler de ce nouvel amour, dont le prologue de trois semaines a produit la Nuit de décembre.

Revenons maintenant à la Confession d’un enfant