Page:Musset - Biographie d’Alfred de Musset, sa vie et ses œuvres.djvu/155

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

différent aux événements de son temps et aux affaires du pays. À la vérité, il débutait par ces mots :


Pour être d’un parti, j’aime trop la paresse,
Et dans aucun haras je ne suis étalon.


Mais la prétendue paresse d’un jeune homme très laborieux et très occupé dans ce moment-là n’était que le respect de lui-même et la résolution de ne jamais déserter la poésie. Cette sage ligne de conduite, qu’il a toujours suivie, ne l’empêchait pas de sentir très vivement tout ce qui intéressait le salut et l’honneur du pays. Les vers sur la nouvelle loi étaient adressés, en manière d’épître, au premier ministre d’alors, qui eut le bon esprit de ne pas en garder rancune à l’auteur. Les hommes politiques ont l’habitude de sourire des poètes qui se mêlent des affaires de ce monde ; et pourtant, ceux qui tenaient en ce temps-là les destinées de la France dans leurs mains, en sont réduits aujourd’hui à redemander pour eux-mêmes un peu de cette liberté qu’ils retiraient aux autres avec tant d’acharnement, et contre laquelle ils ont tant déclamé[1]. Le procès de Fieschi prouva qu’il n’avait existé aucune corrélation entre les journaux, les livres, les pièces de théâtre de l’année 1835, et un obscur complot tramé par trois mercenaires subalternes, au fond d’une boutique d’épicier ;

  1. Ceci a été écrit sous le règne de Napoléon III.
    P. M.