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IV


Le triste effet produit par mon chant ne laissait pas que de m’attrister. — Hélas ! musique, hélas ! poésie, me répétais-je en regagnant Paris, qu’il y a peu de cœurs qui vous comprennent !

En faisant ces réflexions, je me cognai la tête contre celle d’un oiseau qui volait dans le sens opposé au mien. Le choc fut si rude et si imprévu, que nous tombâmes tous deux sur la cime d’un arbre qui, par bonheur, se trouva là. Après que nous nous fûmes un peu secoués, je regardai le nouveau venu, m’attendant à une querelle. Je vis avec surprise qu’il était blanc. À la vérité, il avait la tête un peu plus grosse que moi, et, sur le front, une espèce de panache qui lui donnait un air héroï-comique ; de plus, il portait sa queue fort en l’air, avec une grande magnanimité : du reste, il ne me parut nullement disposé à la bataille. Nous nous abordâmes fort civilement, et nous nous fîmes de mutuelles excuses, après quoi nous entrâmes en conversation. Je pris la liberté de lui demander son nom et de quel pays il était.

— Je suis étonné, me dit-il, que vous ne me connaissiez pas. Est-ce que vous n’êtes pas des nôtres ?