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roue une rosace sur le sable, reprit au trot la route de son hôtel splendide.

Le disciple infortuné de Cujas appuya sur les flancs étiques de sa monture ses talons dépourvus d’éperons. Sa rosse récalcitrante piétina, et se couvrit de boue ; après un demi-quart d’heure, l’animal s’étant résigné, la raillerie publique oublia le cavalier. Mais quelle profonde tristesse !

Le bourgeois posa sur son chapeau imperméable son mouchoir à tabac, afin de le garantir de la pluie ; le petit garçon pleura.

Ainsi, le hasard voulut que ces trois personnages vinssent à repasser par la même rue, mais avec des physionomies différentes.

Dans la tête de la dévote se peignait alors des couleurs les plus vermeilles ce siècle qui, à bon droit, a été appelé le restauré. Dans son imagination chantaient de joyeuses files de moines, de copieux bataillons de diacres ; de discrets confessionnaux s’ouvraient dans la scrupuleuse obscurité des chapelles ; dans des salons aristocratiques s’arrondissaient des mollets d’évêque à bas violets bien tendus. Ô temps à jamais évanouis ! Une larme roula sur la joue éraillée de la pauvre femme.

Dans la tête stupide de l’impassible dandy, il ne se passa rien. Mais le pauvre étudiant, qui, n’ayant pas d’argent, ne pouvait manquer d’être philosophe, songeait piteusement au siècle des marquises et des mou-