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Vas-y. — Je sortirai par cet appartement.
Je serai rêveur, sombre, et d’une humeur atroce ;
Mais, dès qu’on entendra le bruit de mon carrosse,
Compte qu’après avoir dûment délibéré,
Dit quelque mal de moi, peut-être un peu pleuré,
La duchesse pourra changer de fantaisie.
Ses caprices ne sont qu’un peu de jalousie.
Elle prétend, au vrai, détester l’Opéra ;
Elle n’y viendrait pas, mais elle m’y suivra.

Lisette.

De grâce, écoutez-moi.

Le duc.

De grâce, écoutez-moi.J’y gagerais ma tête !
Déjà dans ce dessein sans doute elle s’apprête.
Sois sûre qu’elle va demander ses chevaux,
Choisir le plus coquet parmi ses dominos,
Et, les yeux aveuglés sous un capuchon rose,
D’un petit mal bien clair chercher bien loin la cause.
Puisse-t-elle à ce bal trouver beaucoup d’appas !
Quant à moi, tu sais bien que je n’y reste pas.
Tu sais que je reviens. — Ainsi tu vois, ma belle,
Que lever tout obstacle est une bagatelle.
Je vais faire, au hasard, une visite ou deux,
Perdre quelques louis, peut-être, à leurs sots jeux,
Dépenser ma soirée à parler sans rien dire ;
Le jour est aux ennuis, et le reste à Zaïre.
On sonne.
On t’appelle. — Au revoir.