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Tebaldeo.

Je n’appartiens à personne ; quand la pensée veut être libre, le corps doit l’être aussi.

Lorenzo.

J’ai envie de dire à mon valet de chambre de te donner des coups de bâton.

Tebaldeo.

Pourquoi, monseigneur ?

Lorenzo.

Parce que cela me passe par la tête. Es-tu boiteux de naissance ou par accident ?

Tebaldeo.

Je ne suis pas boiteux ; que voulez-vous dire par là ?

Lorenzo.

Tu es boiteux ou tu es fou.

Tebaldeo.

Pourquoi, monseigneur ? vous vous riez de moi.

Lorenzo.

Si tu n’étais pas boiteux, comment resterais-tu, à moins d’être fou, dans une ville où, en l’honneur de tes idées de liberté, le premier valet d’un Médicis peut te faire assommer sans qu’on y trouve à redire ?

Tebaldeo.

J’aime ma mère Florence ; c’est pourquoi je reste chez elle. Je sais qu’un citoyen peut être assassiné en plein jour et en pleine rue, selon le caprice de ceux qui la gouvernent ; c’est pourquoi je porte ce stylet à ma ceinture.