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nouvelle tour de Babel, au milieu du plus maudit baragouin ; les Allemands ne pousseront jamais à Florence, et pour les y greffer, il faudra un vigoureux lien.

Le marchand.

Voyez, mesdames ; que Vos Seigneuries acceptent un tabouret sous mon auvent.

Un cavalier.

Tu es du vieux sang florentin, père Mondella ; la haine de la tyrannie fait encore trembler tes doigts ridés sur tes ciselures précieuses, au fond de ton cabinet de travail.

L’orfèvre.

C’est vrai, Excellence. Si j’étais un grand artiste, j’aimerais les princes, parce qu’eux seuls peuvent faire entreprendre de grands travaux ; les grands artistes n’ont pas de patrie ; moi, je fais des saints ciboires et des poignées d’épée.

Un autre cavalier.

À propos d’artiste, ne voyez-vous pas dans ce petit cabaret ce grand gaillard qui gesticule devant des badauds ? Il frappe son verre sur la table ; si je ne me trompe, c’est ce hâbleur de Cellini.

Le premier cavalier.

Allons-y donc, et entrons ; avec un verre de vin dans la tête, il est curieux à entendre, et probablement quelque bonne histoire est en train.

Ils sortent. — Deux bourgeois s’assoient.